Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 1.djvu/337

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faires. La faveur dont il jouissait variait selon le caprice du tyran, et sa vie dépendait du plus léger soupçon ou de la moindre circonstance. La méchanceté ou le fanatisme inspira tout à coup un Africain qui passait pour être profondément versé dans la connaissance de l’avenir : cet homme annonça que Macrin et son fils régneraient un jour sur l’Empire romain. Le bruit s’en répandit aussitôt dans les provinces, et lorsque le prophète eut été envoyé chargé de chaînes dans la capitale, il soutint, en présence du préfet de la ville, la vérité de sa prédiction. Ce magistrat, qui avait reçu des ordres précis de rechercher les successeurs de Caracalla, s’empressa de communiquer cette découverte à la cour de l’empereur, qui résidait alors en Syrie ; mais malgré toute la diligence des courriers publics, un ami de Macrin trouva le moyen de l’avertir du danger qu’il courait. Le prince conduisait un chariot de course lorsqu’il reçut des lettres de Rome : il les donna sans les ouvrir à son préfet du prétoire, en lui recommandant d’expédier les affaires ordinaires, et de lui faire ensuite le rapport des plus importantes. Macrin apprit ainsi le sort dont il était menacé : résolu de détourner l’orage, il enflamma le mécontentement de quelques officiers subalternes, et se servit de la main de Martial, soldat déterminé, qui n’avait pu obtenir le grade de centurion. L’empereur était parti d’Édesse pour se rendre en pèlerinage à Charres[1], dans un fa-

  1. Charræ, aujourd’hui Harran, entre Édesse et Nisibis,