Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 1.djvu/406

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l’insolence des esclaves l’avait empêché de paraître devant ces fiers patriciens. Il se rappelait aussi l’amitié d’un petit nombre qui l’avaient secouru dans sa pauvreté, et qui avaient guidé ses premiers pas dans la carrière des honneurs. Mais ceux qui avaient dédaigné le paysan de la Thrace, et ceux qui l’avaient protégé, étaient coupables du même crime ; ils avaient tous été témoins de son obscurité. Plusieurs furent punis de mort ; et en livrant aux supplices la plupart de ses bienfaiteurs, Maximin publia en caractères de sang l’histoire ineffaçable de sa bassesse et de son ingratitude[1].

L’âme noire et féroce du tyran recevait avidement toutes sortes d’impressions sinistres contre les citoyens les plus distingués par leur naissance et par leur mérite. Dès que le mot de trahison venait l’effrayer, sa cruauté n’avait plus de bornes, et devenait inexorable. On avait découvert ou imaginé une conspiration contre sa vie ; Magnus, sénateur-consulaire, était nommé comme le principal auteur du complot ; et, sans qu’on entendît un seul témoin, sans jugement, sans avoir la permission de se défendre, il fut mis à mort avec quatre mille de ses prétendus complices. Une foule innombrable d’espions et de délateurs infestait l’Italie et les provinces : sur la plus légère accusation, les premiers ci-

  1. Hist. Aug., p. 141 ; Hérodien, l. VII, p. 237. C’est avec une grande injustice que l’on accuse ce dernier historien d’avoir épargné les vices de Maximin.