Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/100

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on a peut-être exécuté de nos jours[1] des entreprises aussi merveilleuses[2]. Dès que Mahomet eut des navires et des troupes dans la partie supérieure du havre, avec des tonneaux réunis par des solives et des anneaux de fer, et revêtus d’un plancher solide, il construisit à l’endroit le plus resserré un pont, nu plutôt un môle, large de cinquante coudées et long de cent. Il établit un de ses plus grands canons sur cette batterie flottante, tandis que les quatre-vingts galères, les troupes et les échelles, approchaient du côté le plus accessible, celui par où les guerriers latins avaient autrefois emporté la ville d’assaut. Ou a reproché aux chrétiens de n’avoir pas détruit les ouvrages avant qu’ils fussent achevés ; mais un feu supérieur fit taire le feu de leur batterie, et ils essayèrent une nuit de brûler les navires ainsi que le pont du sultan. La vigilance de Mahomet empêcha leur approche ; les galiotes les plus avancées furent prises ou coulées bas ; il fit inhumainement massacrer quarante jeunes guerriers, les plus braves de l’Italie et de la Grèce. L’empereur fit exposer sur ses remparts les têtes de deux cent soixante captifs musulmans, sans que ces cruelles mais justes représailles pussent diminuer sa douleur. Après un siége

  1. Cette opération fut peut-être conseillée et exécutée par un Grec de Candie, qui avait servi les Vénitiens dans une entreprise pareille (Spond., A. D. 1438, no 37).
  2. Je veux surtout parler de nos embarcations sur les lacs du Canada en 1776 et 1777, dont le travail fut si considérable ; et dont l’effet fut si inutile.