Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/143

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tous ces terribles emblèmes qu’on voyait flotter sur les drapeaux, rappelaient les légions et les cohortes qui avaient autrefois combattu pour la république. L’empereur jurait trois fois de maintenir les libertés de Rome, d’abord au pont Milvius, ensuite à la porte de la ville, enfin sur l’escalier du Vatican, et la distribution des largesses d’usage imitait faiblement la magnificence des premiers Césars. Il était couronné dans l’église de Saint-Pierre par le successeur de ce prince des apôtres ; la voix de Dieu se confondait avec celle du peuple ; le consentement du peuple se manifestait par ces acclamations : « Victoire et longue vie au pape notre souverain ! victoire et longue vie à l’empereur notre souverain ! victoire et longue vie aux soldats romains et teutons[1] ! » Les noms de César et d’Auguste, les lois de Constantin et de Justinien ; l’exemple de Charlemagne et d’Othon, établissaient la suprême domination des empereurs ; on gravait leur titre et leur image sur les monnaies du pape[2] ; et pour constater leur ju-

  1. Exercitui romano et teutonico ! On s’apercevait en effet de la réalité de l’armée des Allemands ; mais ce qu’on appelait l’armée romaine n’était plus que magni nominis umbra.
  2. Muratori a donné la série des monnaies pontificales (Antiquit., t. II, Dissert. 27, p. 548-554). Il n’en trouve que deux antérieures à l’année 800 ; nous en avons cinquante depuis Léon III jusqu’à Léon IX, où l’on voit le titre et l’image de l’empereur qui régnait alors : aucune de celles de Grégoire VII ou d’Urbain II n’est parvenue jusqu’à nous ;