Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 13.djvu/31

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l’on venait de jurer la paix ; et en exécution du traité, les Turcs furent attaqués par les chrétiens, auxquels ils purent alors, avec quelque raison, donner le nom d’infidèles. Les maximes du temps pallièrent le parjure de Ladislas, dont le succès et la délivrance de l’Église latine auraient été la meilleure excuse ; mais le traité qui aurait dû lier sa conscience, avait diminué ses forces. Les volontaires allemands et français, lorsqu’ils avaient entendu proclamer la paix, s’étaient retirés avec des murmures d’indignation. Les Polonais étaient fatigués d’une expédition si éloignée de leur pays, et peut-être dégoûtés d’obéir à des chefs étrangers ; leurs palatins se hâtèrent de profiter de la permission de se retirer dans leurs provinces ou dans leurs châteaux. Les Hongrois mêmes étaient divisés par des factions, ou retenus par des scrupules louables ; et les débris de la croisade qui entreprirent cette seconde expédition, se trouvèrent réduits au nombre insuffisant de vingt mille hommes. Un chef des Valaques, qui joignit l’armée royale avec ses vassaux, osa observer que le sultan était souvent suivi d’une troupe aussi nombreuse dans ses parties de chasse ; et le don qu’il fit à Ladislas de deux chevaux d’une vitesse extraordinaire aurait pu indiquer ce qu’il augurait de l’événement ; mais le despote de Servie, après avoir recouvré son royaume et retrouvé ses enfans, se laissa tenter par la promesse de nouvelles possessions. L’inexpérience de Ladislas, l’enthousiasme du légat et la présomption du vaillant Huniades lui-même, leur persuadèrent que tous les