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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 2.djvu/84

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les sauvages grossiers qui habitaient le septentrion, la pauvreté, la solitude et les soins pénibles de la vie domestique garantissaient les femmes de ces dangers. Le chaume, qui laissait leurs cabanes ouvertes de tous côtés à l’œil de l’indiscrétion ou de la jalousie, était pour la fidélité conjugale un rempart plus sûr que les murs, les verroux et les eunuques d’un harem. À cette cause on en peut ajouter une plus honorable. Les Germains traitaient leurs femmes avec estime et confiance ; ils les consultaient dans les occasions les plus importantes, et ils se plaisaient à croire que leur âme renfermait une sainteté et une sagesse surnaturelles. Quelques-unes de ces interprètes du destin, telles que Velleda dans la guerre des Bataves, gouvernèrent, au nom de la divinité, les plus fières d’entre les nations germaniques[1]. ; sans être adorées comme déesses, les autres jouissaient de la considération que méritaient les compagnes libres des soldats, associées, comme l’indiquaient les cérémonies mêmes du mariage, à une vie de fatigue, de travaux et de gloire[2]. Dans les grandes invasions, les camps des Barbares étaient remplis d’une multitude de femmes, qui, fermes au milieu du bruit des armes, contemplaient d’un œil

    beautés de Rome, et à leur inspirer la tendresse et la sensualité.

  1. Tacite, Hist., IV, 62, 65.
  2. Le présent de mariage était une paire de bœufs, des chevaux et des armes. (Germ., c. 18.) Tacite traite ce sujet avec un peu trop de pompe.