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Leur peu d’égard pour les prophéties.

Il est au moins douteux qu’aucun de ces philosophes ait jamais lu les apologies multipliées que les premiers chrétiens ont publiées en leur faveur et pour la défense de leur religion[1] ; mais on voit avec peine qu’une pareille cause n’ait pas été soutenue par des défenseurs plus habiles. Ils exposent, avec un esprit et une éloquence superflus, l’extravagance du polythéisme ; ils cherchent à émouvoir notre compassion en développant l’innocence et les maux de leurs frères maltraités ; mais, lorsqu’ils veulent démontrer l’origine céleste du christianisme, ils insistent bien plus fortement sur les prédictions qui ont annoncé le Messie, que sur les miracles qui ont accompagné sa venue. Leur argument favori peut édifier un chrétien ou convertir un Juif, puisque l’un et l’autre reconnaissent l’autorité de ces prophé-

    et éclaircit ceux de Pline-le-Jeune, de Tacite, de Gallien, de Marc-Aurèle, et peut-être d’Épictète (car il est douteux que ce dernier philosophe ait voulu parler des chrétiens). Sénèque, Pline l’Ancien et Plutarque, ont entièrement passé sous silence la nouvelle religion.

  1. Les empereurs Adrien, Antonin, etc., lurent avec surprise les apologies de saint Justin martyr, d’Aristide, de Méliton, etc. (Voyez saint Jérôme, ad mag. orat. ; Orose, l. VIII, c. 13, p. 488.) Eusèbe dit expressément que la cause du christianisme fut défendue devant le sénat dans un discours très-élégant, par Apollonius le martyr. Cum judex multis cum precibus obsecrasset petiissetque ab illo uti coram senatu rationem fidei suæ redderet, elegantissimâ oratione pro defensione fidei pronuntiatâ, etc. (Vers. lat. d’Eusèbe, l. V, c. 21, p. 154) (Note de l’Éditeur.)