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Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/417

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mations du peuple d’Orient unirent le nom de Crispus à celui de l’empereur. On proclamait hautement le bonheur du monde conquis et gouverné par un empereur doué de toutes les vertus, et par son fils, prince déjà illustre, le bien-aimé du ciel, et la vivante image des perfections de son père. La faveur publique, rarement attachée à la vieillesse, répandait tout son éclat sur la jeunesse de Crispus. Il méritait l’estime et gagnait les cœurs des courtisans, de l’armée et du peuple. Les peuples ne rendent hommage qu’avec répugnance au mérite du prince régnant ; la mesure en est connue ; la voix de la louange est couverte par l’injustice et les murmures des mécontens ; mais ils se plaisent à fonder sur les vertus naissantes de l’héritier de leur souverain des espérances illimitées de bonheur public et particulier[1].

Jalousie de Constantin. A. D. 324. 10 octobre.

Cette dangereuse popularité excita l’attention de Constantin. Comme père et comme empereur, il ne voulait point souffrir d’égal. Au lieu d’assurer la fidélité de son fils par les nobles liens de la confiance et de la reconnaissance, il résolut de prévenir ce qu’on pouvait avoir à craindre des mécontentemens de son ambition. Crispus eut bientôt à se plaindre de ce que son frère, encore enfant, était envoyé, avec le titre de César, pour gouverner son département

  1. Euseb., Hist. ecclésiast., l. X, c. 9 ; Eutrope (x, 6) l’appelle egregium virum ; et Julien (orat. 1) fait clairement allusion aux exploits de Crispus durant la guerre civile. Voyez Spanheim, Comment., p. 92.