Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 6.djvu/329

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Attila inquiet consulta les aruspices ; on assure qu’après avoir examiné les entrailles et raclé les os des victimes, ils lui annoncèrent, dans un langage mystérieux, sa défaite et la mort de son plus redoutable ennemi, et que le Barbare, en acceptant l’augure, témoigna involontairement son estime pour le mérite supérieur d’Ætius : mais le découragement qu’Attila aperçut parmi les Huns, l’engagea à user de l’expédient si familier aux généraux de l’antiquité, d’animer leurs troupes par une harangue militaire ; il leur parla comme un héros qui avait souvent combattu et vaincu à leur tête[1]. Il leur représenta leurs anciens exploits, leur danger présent, et leurs espérances pour l’avenir ; la même fortune qui leur avait ouvert les déserts et les marais de la Scythie, qui les avait fait triompher, presque sans armes, de tant de nations guerrières, leur réservait les jouissances de cette journée mémorable pour récompense de leurs travaux et de leurs victoires. Il peignit les précautions de ses ennemis, leur étroite alliance, et le choix qu’ils avaient fait d’une position avantageuse, comme l’effet de la crainte et non de la prudence. Les Visigoths faisaient, disait-il, toute la force

  1. Je ne me dissimule pas que la plupart de ces harangues sont composées par les historiens. Cependant les anciens Ostrogoths qui avaient servi sous Attila, ont pu rendre son discours à Cassiodore. Les idées et les expressions ont une tournure scythe et originale ; et j’ai peine à croire qu’un Italien du sixième siècle ait imaginé le hujus certaminis gaudia.