Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/17

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moins avec l’autorité de roi des Romains[1]. Comme Romain, l’étude des belles-lettres et de la jurisprudence faisait partie de son éducation ; mais il s’était attaché, par hasard ou par politique, à parler familièrement l’idiome des Germains. Les Barbares indépendans venaient en foule au tribunal d’un étranger qui possédait le rare talent d’expliquer dans leur langue les règles de la raison et de l’équité. L’activité et l’affabilité du juge le rendaient cher aux peuples ; ils se soumettaient sans murmure à la sagesse impartiale de ses ordonnances ; et le règne de Syagrius sur les Francs et sur les Bourguignons semblait les ramener aux institutions primitives de la société civile[2]. Au milieu de ces paisibles occupations, il reçut et accepta fièrement le défi de Clovis, qui, à la manière et à peu près dans le style de la chevalerie, sommait son rival de désigner le jour et le lieu de la bataille[3]. Dès le temps de César, Soissons

  1. J’observerai que Frédégaire, dans son Épitome de saint Grégoire de Tours (t. II, p. 398), a prudemment substitué le nom de Patricius au titre peu croyable de rex Romanorum.
  2. Sidonius (l. V, epist. 5, t. I, p. 794), qui le nomme le Solon, l’Amphion des Barbares, emploie, en s’adressant à ce roi imaginaire, le style de l’amitié et de l’égalité. Ce fut ainsi que l’artificieux Déjocès s’éleva au trône des Mèdes par la sagesse de ses jugemens. (Hérodote, l. I, c. 96-100.)
  3. Campum sibi præparari jussit. M. Biet (p. 226-251) a marqué avec exactitude le lieu de la bataille ; elle se donna à Nogent, abbaye de bénédictins, éloignée de Soissons d’environ dix milles vers le nord. Le champ de bataille était