Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/133

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de son frère ; et toute la pureté d’une conduite sans reproche ne pouvait le préserver de l’humeur qu’éprouvait Justinien en le voyant digne de la confiance des mécontens. Il donnait aux sujets de l’empereur l’exemple d’une parfaite obéissance ; il avait noblement refusé de prostituer son nom et son caractère dans les factions du cirque ; une innocente gaîté tempérait la gravité de ses mœurs, et ses richesses étaient employées à secourir sans intérêt le mérite ou le besoin. Sa valeur avait triomphé autrefois des Esclavons du Danube et des rebelles de l’Afrique. La première nouvelle de son élévation ranima l’espoir des Italiens ; et il reçut en secret l’assurance qu’une foule de déserteurs romains abandonnerait, à son approche, le drapeau de Totila. Son second mariage avec Malasuinthe, petite-fille de Théodoric, le rendait cher aux Goths eux-mêmes ; et ils marchèrent avec répugnance contre le père d’un enfant royal, dernier rejeton de la ligne des Amali[1]. L’empereur lui assigna des honoraires considérables. Germanus ne craignit pas de sacrifier sa fortune particulière : ses deux fils étaient remplis d’activité et jouissaient de la faveur populaire ; il forma son armée et ses recrues avec tant de célérité, qu’il surpassa les espérances publiques. On lui permit de choisir quelques escadrons parmi les cavaliers de la Thrace. Les vétérans, ainsi que les jeunes gens de Constantinople et

  1. Conjuncta Aniciorum gens cum Amalâ stirpe, spem adhuc utriusque generis promittit. (Jornandès, c. 60, p. 703.) Cet auteur écrivait à Ravenne avant la mort de Totila.