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s’éteint si vite chez elle, « aussitôt après la fécondation », dit Samson, perdurât une fois transmis[1]… Mais quand cela serait ! Je puis vous affirmer que j’ai vu des chiens poursuivre de leurs assiduités d’autres chiens, avérés puceaux ; et reprendre ces assiduités à chaque nouvelle rencontre sans aucune considération d’époques.

— Si les faits que vous rapportez sont exacts — et je consens à les accepter pour tels…

— Je voudrais voir que vous ne le fissiez pas !

— Comment expliquez-vous qu’ils ne soient pas encore entrés en ligne de compte dans le Grand-Livre de la Science ?

— C’est d’abord que ce « Grand-Livre » n’existe pas ; c’est aussi que les matières que je vous dis ont été jusqu’à présent fort peu observées ; c’est enfin qu’il est aussi difficile et aussi rare de bien observer que de bien penser et de bien écrire ; un bon observateur suffit à faire un grand savant. Le grand homme de science est tout aussi rare que tout autre homme de génie ; les demi-savants sont nombreux pour accepter une théorie de tradition, qui les guide ou qui les fourvoie, et pour tout « observer » d’après elle. Tout confirma longtemps l’horreur que la Nature avait du vide ; oui, toutes les observations. Tout confirma longtemps l’existence de deux électricités différentes et qu’une sorte d’instinct quasi sexuel attirait. Tout confirme à présent encore cette théorie de l’instinct sexuel… De sorte que la stupeur de certains éleveurs est bouffonne, à constater des goûts

  1. Même M. de Gourmont sait que « dans les conditions normales, la femelle cavalée doit cesser aussitôt d’émettre son odeur sexuelle ».
    (Physique de l’amour, p. 179.)