Page:Gide - Corydon, 1925.djvu/90

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
88

avant qu’il ne l’avait prise ? Dirons-nous que De Vries a raison contre Darwin ? Non, pas plus que Darwin, que Lamarck même, n’avaient raison contre X.

— Devant vous on n’osera même plus dire que Galilée…

— Permettez-moi de distinguer entre la remise au point des faits et l’explication qu’on en donne. Celle-ci, l’explication, demeure flottante ; mais loin de suivre toujours les constatations nouvelles, elle les précède souvent ; parfois, souvent même, nous voyons la théorie devancer l’observation, et celle-ci confirmer seulement ensuite la téméraire proposition du cerveau. Prenez pour hypothèses mes avances ; je me tiendrai satisfait si seulement vous leur reconnaissez quelque vertu d’initiative. Encore une fois les faits sont là, que vous ne pouvez pas nier. Quant à l’explication que j’en donne, je suis prêt à la renoncer, dès que vous m’en baillerez une meilleure.

I

Nous avons pu considérer hier, poursuivit-il, le rôle prépondérant de l’odorat, ce sens avertisseur de l’instinct, dans les conjugaisons animales. C’est grâce à lui que le flottant désir du mâle va délibérément se tourner vers la femelle — et uniquement vers la femelle en rut. On peut dire, sans trop exagérer, que la « sexualité » de l’instinct génésique (pour parler le jargon moderne), gît dans le sens olfactif du mâle.