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on pourrait croire que la parure a été l’invention exclusive des filles d’Ève… Il me semble que pour les parer, l’argent, l’or (énumération), les diamants (énum.), les fleurs (énum.), les plumes (énum.), ailes de papillons… ; les hommes n’ont pas encore osé aborder la « création » de ces joyaux dans lesquels semble venir coqueter, avant de s’envoler, la pensée des femmes : leurs exquis, spirituels ou triomphants chapeaux…

— Excusez-le ; sans doute il en voyait dans l’assistance.

Par un très net contraste, alors que monte et se maintient, tout au moins dans nos pays civilisés, l’antique goût des femmes pour la parure, les hommes se détachent de plus en plus de toute recherche…

— Je vous l’ai dit : l’efflorescence du mâle n’est pas nécessairement vénusté.

— Attendez que j’aie fini de lire : … le sombre costume du Tiers paraît lui-même trop encombrant : on l’allège, on le raccourcit, on le réduit en simple veston, si bien que, dans les cérémonies auxquelles assistent les femmes, nous faisons figure d’humbles larves se glissant parmi les fleurs.

— Oui, ceci est assez galant.

Cette évolution est tout à fait caractéristique ; elle sépare l’espèce humaine des espèces animales supérieures, aussi bien qu’aucun de ses caractères physiques, qu’aucun autre de ses caractères psychiques. Elle est en effet exactement l’opposé de celle qui s’est manifestée dans une grande partie du règne animal. Là, le sexe favorisé par excellence est le sexe masculin ; il l’est de toute façon, et déjà chez des êtres peu