Page:Gide - Le Voyage d’Urien, Paludes.djvu/170

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

le même jour. Donc mes tiroirs restaient à peu près vides, et pour payer la cuisinière il fallait priver Albert de ses leçons de violon. J'en étais désolé, car ce sont les seules distractions de sa longue convalescence. Je ne sais comment, la cuisinière eut vent de la chose; cette pauvre fille nous est très attachée; - vous la connaissez bien, c'est Louise. Elle vint nous trouver en pleurant, disant qu'elle se priverait de manger plutôt que de peiner Albert. Il n'y avait qu'à accepter, pour ne pas froisser cette brave fille; mais je pris la résolution de me relever deux heures chaque nuit, lorsque ma femme me croit endormi, et de ramasser, à l'aide de quelques traductions d'articles anglais que je sais où placer, l'argent dont nous privions la bonne Louise.

« La première nuit tout alla bien; Ursule dormait profondément. La seconde nuit, à peine étais-je installé, qui vois-je arriver?... Ursule! - Elle avait eu la même idée : pour payer Louise, elle préparait de petits écrans, qu'elle sait où placer; - vous savez qu'elle possède un certain talent pour l'aquarelle...