Page:Gide - Philoctète, 1899.djvu/92

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

normal et nécessaire a disposé toutes les formes dans une réciproque et symétrique dépendance, où l’orgueil du mot ne supplante pas la Pensée, – où les phrases rythmiques et sûres, symboles encore, mais symboles purs, où les paroles, se font transparentes et révélatrices.

De telles œuvres ne se cristallisent que dans le silence ; mais il est des silences parfois au milieu de la foule, où l’artiste réfugié, comme Moïse sur le Sinaï, s’isole, échappe aux choses, au temps, s’enveloppe d’une atmosphère de lumière au-dessus de la multitude affairée. En lui, lentement, l’Idée se repose, puis lucide s’épanouit hors des heures. Et comme elle n’est pas dans le temps, le temps ne pourra rien sur elle. Disons plus : on se demande si le Paradis, hors du temps lui-même, n’était peut-être jamais que là, – c’est-à-dire qu’idéalement…