Page:Gilbert - Œuvres, édition Nodier, Garnier.djvu/10

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portée, ils épuisèrent leurs derniers moyens pour l’envoyer terminer ses études au célèbre collège de l’Arc, dans la ville de Dôle. Il y a peu d’années que le professeur qui avait enseigné à Gilbert les règles de la versification française, et qui n’existe plus maintenant, se flattait d’avoir fait des poëtes de tous ses écoliers, un certain Gilbert excepté. Ce Gilbert était précisément le grand satirique de notre siècle, que des inégalités, des fautes de goût, des incorrections, des bizarreries, des taches trop nombreuses enfin, n’empêcheraient pas d’être cité parmi les premiers poëtes de son temps, et peut-être avant eux, si, au lieu d’avoir eu les philosophes pour adversaires, il les avait eus pour amis. Il était fort maladroit de s’attaquer aux hommes qui font les réputations en France depuis que l’esprit de sophisme a usurpé les droits et l’empire de la morale, et c’est ce qui arriva à Gilbert, soit qu’un mouvement de dépit ou un simple caprice ait déterminé son choix; soit, comme j’aime mieux à le croire, qu’il ait généreusement sacrifié les intérêts de sa fortune à ceux de sa conscience. Il faut savoir quelque