Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/112

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Pour celui-ci, il n’est plus question d’entraves, de réserves, de symboles. Plus tard, à l’Arena, dans une autre période de sa vie, il deviendra l’artiste, le poète incomparable dont Taine écrira, ébloui : « Qu’il eût tardé cent ans à naître, et l’Italie avait un second Raphaël. » Pour le moment, ce n’est qu’un jeune réfractaire en rupture violente avec le moyen âge. Il conquiert son indépendance et affirme sa liberté. Il est à cet instant de révolte qui marque quelquefois les débuts des grands maîtres. Il y a en lui à cette date un peu de rudesse et de défi, quelque chose de rogue et de goguenard, du Caravage ou du Courbet. Impatient de la routine, brouillé avec l’école, enhardi par de premiers succès, tel que Dante le dépeint dans ce moment de jactance :

Credette Cimabue nella pittura
Tener lo campo, ed or ha Giotto il grido,

l’occasion s’offre à lui de donner sa mesure dans une œuvre à sa taille, solennelle par ses dimensions comme par son emplacement. Tout conférait à cette entreprise l’importance d’un manifeste. Et c’est bien celui de la Renaissance qu’a promulgué ici Giotto.

Le programme était celui-ci : peindre une biographie complète, non pas celle d’un héros lointain, inaccessible, mais celle d’un contemporain, d’un jeune bourgeois d’Assise qui avait bizarrement tourné, et cela dans la


    p. 205, note 6) dit : avant 1236, mais il ne donne pas ses raisons (voir pourtant même ouvrage, p. 4 note 2). On sait que Giunta avait fait cette même année, un Crucifix (il a disparu au xviie siècle) aux pieds duquel Elie de Cortone était figuré en prières. Les cinq fresques représentent, du côté de saint François : 1o Le renoncement à l’héritage ; 2o La vision d’Innocent III ; 3o Le sermon aux oiseaux ; 4o Les stigmates ; 5o Les funérailles. Ces peintures, mal éclairées, ont été éventrées lors de la construction des chapelles. La troisième et la dernière seules sont encore à peu près complètes. La critique a trop négligé cette œuvre remarquable. Il n’y en a guère de plus importante pour l’histoire de l’art à cette obscure époque. Voir l’étude de M. Pératé dans l’Histoire de l’Art publiée par M. André Michel, t. II, p. 436.