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un poème terrible, une de ces œuvres qui expriment un siècle. C’est le souffle de la mort, la fade haleine du néant.

D’abord un mot des origines. Avant d’être peinture, la danse macabre a commencé par être une danse, exactement un mime, un sermon en action. On le jouait à Gaudebec, en 1393. « La pièce était une figure de la vanité du monde. Les acteurs représentaient tous les états, du sceptre à la houlette. À chaque tour, il en sortait un pour marquer que tout prenait fin, roi comme berger[1]. » Des représentations plus tardives ont également laissé des traces.

Les choses se passaient de la sorte : un prédicateur (on le voit encore à Meslay), faisait un sermon sur le péché ; il racontait la Chute, la naissance de la mort[2]. Alors,

    des femmes, par Denis Catin, curé de Meudon (Arsenal, no 3.637), est signalé par M.  Mâle, p. 408.

  1. Manuscrit de l’abbé Miette (xviiie siècle), découvert par M.  Mâle à la bibliothèque de Rouen. Le document que résume l’abbé Miette est perdu. Mais M.  Mâle a trouvé dans un manuscrit de la Mazarine (no 980) un petit poème latin du xive siècle, espèce de complainte ou de récitatif liturgique, en une vingtaine de distiques, placés dans la bouche d’autant de personnages, et se terminant tous par le refrain : « Vado mori, je vais mourir ». C’est la plus ancienne ébauche actuellement connue de la Danse macabre. Cf. Mâle, loc. cit., p. 390.

    D’autre part, le poète Jean Le Fèvre, dans son Répit de la Mort, écrit en 1376 :

    Je fis de Macabre la danse,
    Qui toute gent mène à sa trace
    Et à la fosse les adresse.

    vers malheureusement fort obscurs (cf. G. Paris, Romania, 1895), mais qui contiennent la première mention qu’on ait relevée de la Danse des morts et de son nom caractéristique. Si l’on songe que la fresque de Pise est de 1370, tout reporte à la même date — environ, le dernier tiers du xive siècle, — les origines de cette invention singulière.

    « Des représentations plus tardives, etc. » En 1449, le duc de Bourgogne fait jouer, à Bruges, « en son hôtel », le « jeu » de la Danse macabre. Le peintre Nicaise de Cambrai avait dessiné les costumes. Laborde, Les Ducs de Bourgogne, Preuves, t. I, 1849, p. 393

  2. On le voyait autrefois à Bâle, Strasbourg, la Chaise-Dieu, etc. C’est l’Acteur des éditions de Guyot Marchand. Souvent (à la Chaise-Dieu, à Meslay, à Bâle, comme plus tard chez Holbein), un prologue biblique accompagne cette première scène : on voit Adam et Ève, au pied de l’arbre auquel