Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/266

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que la copie en pierre des Mystères : toutes les variantes s’expliquent par des jeux de scène différemment réglés[1]. Mais cette idée n’exclut nullement la première. La diffusion même du sujet, la fréquence de groupes aussi coûteux à établir, supposent en effet l’existence d’une dévotion puissante et répandue. Que ne voit-on de même des Descentes de croix, des Érections de la croix ? Les Mises au tombeau semblent en rapport avec les confréries du Saint-Sépulcre, comme les Pietà se rattachent à celles de Notre Dame-de-la-Pitié. Longtemps ces confréries se bornèrent à vénérer des reproductions ou des facsimile de la pierre du Sépulcre : à Paris, au xive siècle, il y en avait au moins trois, dont une aux Cordeliers[2]. Le théâtre, l’habileté et l’audace plus grandes des artistes, le besoin de réalité et de naturalisme, fournirent de nouveaux moyens de figurer les choses ; le cénotaphe fut remplacé par un « tableau vivant ». C’est le développement naturel, le phénomène de croissance que nous avons déjà plus d’une fois constaté.

Mais cette dévotion elle-même ne suffit bientôt plus à l’avidité que le public éprouvait de représentations exactes et de spectacles dramatiques. Il fallut avoir sous les yeux, d’une manière permanente, les épisodes principaux de la Passion de Jésus. Un des plus vieux « Chemins de la croix » qui soient venus jusqu’à nous, est celui d’Adam Krafft à Nuremberg[3]. Il jalonne les quinze cents mètres de route qui vont de la porte du Thiergarten à

  1. Loc. cit., p. 130 et suiv. Abbé Lecler, Etude sur les Mises au tombeau, Limoges. 1888.
  2. La chapelle du Sépulcre de la rue Saint-Martin date de 1326 ; celles du Temple et des Cordeliers étaient un peu plus récentes, mais encore du xive siècle. Ces deux dernières reçurent, dans la suite, des Mises au tombeau.
  3. Cf. Thurston, Histoire du chemin de la croix, trad. franç., 1907, p. 91 ; — Kneller, Geschichte der Kreuzwegandachts, Fribourg…, 1908.