Page:Gillet - Histoire artistique des ordres mendiants.djvu/371

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Paul. Et quand l’obélisque fut dressé sur la place de Saint-Pierre, le pape enregistra ce fait comme un exploit[1]. On ne souffre plus l’antiquité qu’à la condition de servir, elle aussi, l’Église. Qu’eût pensé de ce traitement la cour de Léon X[2] ? Mais au fond, il y avait là une condition de progrès. La superstition des anciens pouvait devenir un obstacle. L’avancement, la vie dans la science, dans les arts, ne pouvaient se confiner dans un idéal rétrograde. C’est déjà toute la querelle des anciens et des modernes[3]. L’Église, une fois de plus, trace le chemin à l’avenir.

Mais c’est surtout l’art religieux qui sortit de cette révision modifié et altéré. Deux ou trois ans avant le procès de Véronèse, et six ou sept après le Concile, se publiait à Louvain un ouvrage important, l’Histoire des Images du savant Molanus[4]. C’était bien une œuvre de défense, qui venait à son heure, en Flandre, dans ce boulevard de l’Église vers le Nord, et au moment où la révolte des « gueux » et l’indépendance de la Hollande commençaient par une formidable explosion de vandalisme. Contre les nouveaux iconoclastes, Molanus se fait l’avocat de l’art religieux. Il en établit fortement les droits sur l’autorité de l’usage et la tradition. Mais en

  1. Cf. Ranke, Histoire de la Papauté, t. II, p. 301 ; Lanciani, La destruction de Rome antique, 1905, p. 175 ; Orbaan, Sixtine Rome, 1910. Sixte-Quint n’a plus aucun sens de la beauté antique. Il fait abattre froidement le Septizonium de Sévère. Une délégation de la noblesse romaine lui apporta ses doléances. Le pape répondit qu’il voulait enlever les antiquités laides, et restaurer celles qui en avaient besoin. Parmi ces antiquités laides qu’il n’eut pas le temps de raser, se trouvait le tombeau de Cecilia Métella !
  2. Cf. la lettre bien connue de Castiglione et de Raphaël à Léon X en 1518, Passavant, Raphaël, trad. Lacroix, 1860, t. I, p. 508 et suiv.
  3. Ranke, ibid., p. 313 et suiv. Constitution de l’idée de science (Galilée, Vico, Baronius), à la fin du xvie siècle.
  4. De historia imaginum libri IV, Louvain, 1570. Dès 1568, Molanus avait fait une dissertation sur le culte des images, qui devint le premier livre de l’ouvrage complet. La meilleure édition est celle de Paquot, Louvain, 1771, in-4o.