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PASTORALE


« Au sein de la cohue où tu seras noyé,
« De longs jours couleront sans but, sans espérance,
« Et l’exil faisant comble à la moindre souffrance,
« Ton être par l’ennui sera bientôt broyé. »

« Elle est âpre, sans doute, et rétive, et marâtre
« La terre où nous jetons sans regret le froment ;
« Mais la huche jamais ne fut vide un moment ;
« Les bûches, chaque hiver, animent toujours l’âtre ».

« Ce sol que nous aimions, un soir, près d’un mourant.
« N’as-tu donc pas juré d’y conserver la trace,
« Et le culte, et l’amour de ceux-là dont la race
« N’espère plus qu’en toi, le dernier des Durant… ?

« Vois, là-haut, ce clocher à la parole altière ;
« Un vieux prêtre y bénit, en juillet, nos amours
« Tel il unit jadis, comme nous, pour toujours,
« Nos chers défunts couchés là-bas, au cimetière.

« Et tu veux déserter les prochaines moissons… ?
« Toi dont les bras musclés et la rude nature
« Révèlent des aïeux la puissante ossature,
« Toi dont les larges mains arrachent des buissons… ? »