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PINDARE

interprétations de détail n’échappent pas à la critique, tant ces matières sont difficiles ! Ce principe d’unité, qui n’est ni une formule morale s’adaptant à toutes les pièces, ni un type d’allégorie historique, il l’appelle une idée poétique. L’expression peut paraître vague ; d’autant plus qu’il ne définit guère lui-même sa pensée ; mais elle indique le vrai point de vue. Il considère chacune des odes comme une véritable œuvre d’art, ayant sa vie propre et sa physionomie à elle. Sur cette question délicate, il faut lire d’excellentes pages de M. Croiset, qui, en complétant Hermann, la traite avec le degré de précision qu’elle comporte et avec un sens très fin du génie grec. Au terme d’idée poétique il substitue celui d’idée lyrique, qui est plus juste ; il y a en effet des idées lyriques comme il y a des idées oratoires, des idées épiques, des idées dramatiques, et chaque genre d’idée produit une sorte d’unité particulière. Pour l’éloquence, pour l’épopée, pour le drame, l’unité se définit facilement ; mais dans le lyrisme, où il n’y a ni une suite de déductions ni le développement d’une action régulière, il n’est pas aisé de la saisir. C’est une harmonie dont les éléments, idée abstraite, image sensible, émotion personnelle, viennent se fondre dans une teinte générale. Tantôt, c’est une idée morale qui domine, et alors la composition, sans s’astreindre à un enchaînement de déductions,