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Page:Girard - Études sur la poésie grecque, 1884.djvu/170

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ÉTUDES SUR LA POÉSIE GRECQUE

s’y rapporte directement, l’homme à son tour, après avoir livré à la vie sociale et scientifique cette partie de lui-même qui est appelée à lutter contre le monde extérieur, trouve son repos et la satisfaction morale de cette autre partie qui constitue son existence individuelle. Ainsi d’un côté sont, avec l’homme, l’État et la science, de l’autre la famille et la piété, qui contiennent toute la vie de la femme, et auxquelles l’homme participe sans s’y enfermer. Et c’est parce qu’il ne s’y enferme pas que le monde est capable d’un progrès, où la femme elle-même et ces sentiments d’une nature plus intime qui font toute sa vie seront entraînés.

Mais on conçoit qu’auparavant il puisse y avoir conflit entre la piété de la femme et la loi de l’État. Or c’est précisément ce conflit, opposition propre de la femme et de l’homme, qui, au sentiment de Hegel, est admirablement représenté dans l’Antigone de Sophocle. De là viennent le sens profond et la beauté morale de cette tragédie. « La piété, dans une de ses manifestations les plus parfaites, l’Antigone de Sophocle, est présentée de préférence comme la loi de la femme… C’est la loi des anciens dieux, des dieux des enfers, la loi éternelle dont personne ne connaît la première apparition, en opposition avec la loi publique, la loi de l’État : contraste des plus moraux et, par cela même, des plus tragiques, dans lequel se personnifient la