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Page:Girard - Études sur la poésie grecque, 1884.djvu/19

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ÉPICHARME

inquiète activité et cet esprit d’aventure ; et c’est ce qui a puissamment aidé ce grand mouvement de colonisation qui leur a donné presque tous les rivages du monde antique. Ils abandonnent sans crainte leur patrie, avec ses institutions, ses usages, les douceurs de sa civilisation, sûrs de se retrouver les mêmes sur un sol étranger, même au seuil de la barbarie. Et une chose bien remarquable, c’est que les qualités les plus délicates et les plus sérieuses de l’esprit grec, celles qui font les artistes et les philosophes et qui semblent avoir le plus besoin de recueillement, s’accommodent très bien de ce mouvement et de ces vicissitudes. Parmi les villes grecques, les plus exposées aux invasions, les plus agitées par les révolutions et en même temps les plus commerçantes et les plus riches, ce sont celles qui occupent les côtes découpées de l’Asie Mineure et les îles voisines, ou encore les colonies lointaines de la Sicile et de l’Italie ; ce sont elles aussi qui produisent ou attirent chez elles la plupart des grands lyriques, les premiers philosophes, les premiers historiens. Vers le temps de la naissance d’Épicharme, Ibycus de Rhégium se rencontre avec Anacréon de Téos à la cour de Polycrate, le célèbre tyran de Samos, Xénophane de Colophon meurt à Élée, sur les côtes de la Grande-Grèce, et, dans la même région, Pythagore de Samos s’établit à Crotone.