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Page:Girard - Études sur la poésie grecque, 1884.djvu/327

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L’ALEXANDRINISME

nales, s’il n’admettait que de petits poèmes écrits à l’intention des lettrés, capables de fournir un aliment à leur curiosité ou de leur plaire par l’habileté de la facture et par des agréments extérieurs, c’est que tels étaient précisément les mérites de cette foule de récits et de légendes qui remplissaient le recueil des Causes. Ces légendes et ces récits, c’était l’antique matière de l’épopée traitée sous la seule forme qui désormais lui convînt. Ainsi pensait déjà Théocrite, dont on a souvent cité les vers contre ces émules impuissants, ces « coqs des Muses qui s’égosillent vainement en face du chantre de Chios. »

L’opinion de Callimaque était donc l’opinion dominante, et son autorité personnelle lui permettait de la considérer comme définitivement établie, quand éclata la contradiction la plus inattendue. Un de ses élèves, un jeune homme de dix-huit ans, qui pendant trois années avait suivi ses leçons, le renia ouvertement dans une circonstance solennelle et rompit avec les doctrines de l’école. Dans une lecture publique, peut-être à un de ces concours que Ptolémée Philadelphe avait institués en l’honneur d’Apollon et des Muses, Apollonius fit connaître des morceaux d’une composition de longue haleine, d’un poème épique à grandes ambitions, avec une action, des caractères, des passions, enfin qui prétendait, par certains côtés,