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— Et Chénier itout ?

— Naturellement.

— Il y en a, peut-être, qui diront que Chénier n’avait pas de castor, ce jour-là, ou ben encore que mon castor n’a pas plus appartenu au patriote qu’à Jean-Marie du deuxième rang. Mais il ne faut pas s’occuper de ces jaseurs-là. Ce sont tous des escarreux, comme on dit, des gens qui prétendent tout savoir et qui ne savent rien. Ça me rappelle que quand je faisais ma rhétorique au petit séminaire de Nicolet avec ce pauvre défunt M. Lacroix, un saint prêtre, et un savant s’il en fut, une discussion s’était élevée à propos du passage des Thermopyles…

— Mais, monsieur Lahaye, interrompit Lucien, vot’castor, lui, y était pas aux Bermovyles. Quisqui l’a ramassé vot’castor, ou betôt celui de Chénier, comme vous dites ?

— C’est le gros Zéphirin Ledoux, qui était le neveu à mon grand-oncle Auguste. Tu as entendu parler du gros Zéphirin ?

— Connais pas.

— N’importe. Or, le gros Zéphirin, qui n’avait jamais été mis au monde pour faire un soldat, et qui avait eu une telle peur qu’il lui était arrivé le même sort qu’à Henri IV, ramassa le castor de son chef, tira sa révérence, et prit les jambes à son cou. Mais il ne courait pas si fort qu’Atalante, et il n’avait pas fait quatre arpents qu’il tomba nez à nez avec deux longs goddams armés chacun de pistolets d’arçon. Le neveu à mon