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rée d’un rempart naturel de pins hauts et serrés les uns contre les autres. Là dormaient les Agniehronnons, leurs corps huileux, souples et nerveux allongés sur la mousse et le gazon.

Le jeune homme enjamba tous ces corps cuivrés qui, mystérieusement éclairés par des échappées de lune, ressemblaient à des statues de bronze renversées par la tempête.

Quand il eut atteint le centre de ce camp volant, il toucha de la main l’un des guerriers, en évitant tout bruit.

L’Indien fut aussitôt sur pied, et porta la main à son tomahawk.

Il était vêtu d’une peau d’ours, qu’il portait à la façon d’une toge romaine, et qui le drapait avec autant de dignité que les Anciens du Capitole. Au travers du corps, il était ceint d’une corde de boyau. Ses cheveux longs, noirs et graisseux, étaient liés en arrière de la tête et ornés de plumes blanches et rouges. Sa figure aux traits énergiques et fiers, ces traits qu’a si bien rendus le célèbre ciseau de Philippe Hébert, étaient recouverts de raies noires, rouges et bleues, tirées des oreilles à la bouche.

C’était Kiotsaeton.

— Que me veut mon frère, le jeune guerrier intrépide ? demanda-t-il à voix basse.

Alors Aontarisati, les yeux pleins d’un feu sombre, redressa sa taille élancée d’éphèbe vigoureux, et dit :

— Chef formidable des Agniehronnons, ton frère Aon-