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jeune captif serait brûlé, afin de se rendre agréable le grand Manitou, par ce supplice d’enfant.

Et l’on attacha Jean, quand il fut revenu de son long évanouissement, à un peuplier au tronc badigeonné de rouge.

Au milieu des hurlements de joie, des vieillards et des jeunes gens, qui trouvent tout naturel de torturer un prisonnier, fût-il un enfant inoffensif, entassent des brindilles et des branches sèches mêlées d’écorces de bouleau sous les pieds de la victime.

Gonaterezon s’approche du bûcher, alors que Jean fait entendre des appels déchirants.

Le bourreau tient dans ses mains la peau d’une cuisse d’aigle, avec le duvet fort inflammable. Il bat ensemble deux pierres de mine, à la façon d’une pierre à fusil avec du fer ou de l’acier. Il met ainsi le feu à un morceau de tondre qu’il place dans de l’écorce de cèdre pulvérisée sous les brindilles. Enfin, il souffle doucement sur l’écorce qui s’enflamme.

Le feu jaillit, crépite, les branches s’allument, la flamme monte mêlée à une fumée opaque ; le supplicié pousse des cris d’épouvante, les Indiens rient.

À ce moment, Nénuphar-du-Lac se rapproche d’Aontarisati, impassible :

— Vaillant guerrier, lui dit-elle à l’oreille, laisseras-tu brûler cet enfant ? Grâce à lui, je t’appartiens à la vie, à la mort. Ignores-tu donc que son supplice a été demandé, surtout, par Gonaterezon, ton rival, furieux de son échec ? Plus brave et plus généreux que tous tes