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de le faire proclamer devant tous, au cas où lui-même tomberait sous quelque balle française ou quelque tomahawk huron, le sagamo reconnu des Agniehronnons.

Andioura, soudain, entendit des branches mortes craquer sous un pied délicat.

Il se lève sur le coude et regarde.

La profonde tristesse qu’Aontarisati a, tout à l’heure remarqué sur ses traits, a fait place à une vive animation.

Les yeux brillants, le cou tendu, Andioura contemple.

À l’extrémité de la bourgade, à quelques pieds d’une cascade à triple étage, dont les eaux, aux reflets de la lune, tombent en nappe d’argent enrichie de diamants de rubis et d’émeraudes, avec un chant sonore, une jeune fille est penchée au-dessus d’un bouleau qu’un caprice de la nature a tordu à quelques pieds du sol.

Cette jeune fille est Biche-Blanche, fille d’Aontarisati et de Nénuphar-du-Lac, la plus resplendissante beauté qu’ait jamais connue la tribu des Agniehronnons.

Cette Indienne, dont la coupe du visage rappelait le grec classique le plus pur, présentait un charme vraiment étonnant chez ce peuple.

Le front bien découvert était auréolé d’une couronne de cheveux qui lui tombait sur les épaules en une somptueuse chape d’ébène d’une nuance si ardente qu’on y surprenait, parfois, des reflets d’un bleu métallique. Le nez était droit et bien dessiné. Quand elle souriait, les lèvres, merveilleusement belles et d’un rouge violent,