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V

LE COMBAT


Hubert se réveille. Il ouvre un œil, puis l’autre, s’étire, baille, se passe les mains dans les cheveux qui ressemblent à une meule de foin, s’asseoit sur son lit et regarde à sa montre.

— Diantre ! il est six heures. Mais, peu importe, mon rendez-vous est pour sept heures. J’ai donc encore une heure devant moi.

Il envoie les couvertures à bas de son lit, et se lève.

— Batiscan ! J’endosserais bien volontiers un costume de chasse pour abattre ce beau merle. Cela compléterait les décors de la scène. Mais non, le frac noir, la cravate blanche me donneront un air très digne, solennel même. On ne se bat pas en duel tous les jours, faisons bien les choses. D’autant plus que si ce blanc bec venait par hasard à bien viser, nous pourrions bien tous les deux rester sur le carreau. Et j’ai tant à cœur d’être poli avec tout le monde, que si la mort venait, m’inviter à faire avec elle une marche plus ou moins sentimentale, il faudrait bien la recevoir en gentilhomme.

Tout en fredonnant un air du pays, Hubert promenait sa savonnette sur son visage qu’il couvrait d’une chaude écume. Il dirigeait si prestement le rasoir dans les parties les plus critiques de sa figure, qu’il eut la satisfaction de se sentir le sang aussi calme que s’il allait enterrer la vie de garçon d’un de ses amis.

En eût-il été ainsi, s’il avait dû se porter à la ren-