Page:Girardin - La Canne de M. de Balzac.djvu/223

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qui se croit elle-même étourdie, et qui s’attend à se tromper toujours ; une mère assez crédule, accoutumée aux enfantillages de sa fille, qui est même flattée de ses distractions, et qui les considère comme autant de preuves de poésie. Plus cette jeune fille dira de choses extravagantes et incompréhensibles, plus on la croira poëte ; c’est au point qu’elle deviendrait folle, qu’on ne s’en apercevrait pas.

Tancrède n’osa suivre Clarisse dans sa chambre, un sentiment de respect le retint ; un autre sentiment lui inspira aussi cette délicatesse : il se trouvait trop mal vêtu pour un fantôme, il n’osait risquer une apparition en redingote, il n’était réellement pas assez élégant pour un idéal. D’ailleurs, il aimait déjà trop pour ne pas tenir à lui ; on acquiert, à ses propres yeux, une grande importance aussitôt qu’on aime, on ne se risque plus légèrement.

Dès qu’il fut possible de sortir de la maison où demeurait madame Blandais, Tancrède revint chez lui. Le lendemain en s’éveillant, il se souvint de Clarisse, et il s’avoua qu’il