Page:Giraudoux - Électre.djvu/94

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paternel qui suivit ma naissance. Tout ce qui est de cette naissance du côté de ma mère, je le hais.

ORESTE. – Pourquoi détestes-tu les femmes à ce point ?

ÉLECTRE. – Ce n’est pas que je déteste les femmes, c’est que je déteste ma mère. Et ce n’est pas que je déteste les hommes, je déteste Égisthe.

ORESTE. – Mais pourquoi les hais-tu ?

ÉLECTRE. – Je ne le sais pas encore. Je sais seulement que c’est la même haine. C’est pour cela qu’elle est si lourde, pour cela que j’étouffe. Que de fois j’ai essayé de découvrir que je haïssais chacun d’une haine spéciale. Deux petites haines, cela peut se porter encore dans la vie. C’est comme les chagrins. L’un équilibre l’autre. J’essayais de croire que je haïssais ma mère parce qu’elle t’avait laissé tomber enfant, Égisthe parce qu’il te dérobait ton trône. C’était faux. En fait j’avais pitié de cette grande reine, qui dominait le