Page:Giraudoux - Provinciales.djvu/97

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aux marteaux, et il semble que c’est dans sa forge qu’on fait les réparations.

Moi, j’attends, sans impatience. Elle repartira. Voyez : le facteur passe, alors qu’il a du retard par le moindre gel. Voyez, la nuit s’affaisse, de si haut qu’on voit les étoiles alors qu’il fait jour, une nuit de demi-deuil, à peine tiède, et qui vous émeut sans vous émouvoir, comme la mort d’un cousin que vous n’aimez pas, mais dont vous héritez. Ma vieille terre repartira : elle repart. Les feuilles des trembles, qui tournaient tout à l’heure leur dos d’argent vers le ciel, refrétillent et nageotent à nouveau dans le courant d’air ; les jeunes filles s’appuient au bras des jeunes gens et cependant n’en vont pas plus vite ; et quelque chose bourdonne qui n’est pas la scierie ; et Mme Roban, la femme du notaire, qui avait profité du calme pour faire de la bicyclette, vacille, perd la tête, puis son chapeau, puis les pédales, et tombe, résignée, ayant à peine roulé cent pas, au pied d’une borne ironique qui marque cinquante-sept kilomètres.

Estelle, naturellement, a raté la bonne occasion. La voilà seulement qui frappe. Elle entre demain au couvent, et vient faire ses adieux à