Page:Giraudoux - Suzanne et le Pacifique, 1925.djvu/238

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Simon me répondit, le soir même, par une lettre écrite de ma main, qu’il se passait en Europe que la guerre finissait. L’uniforme était maintenant grenat avec les pattes d’épaules rouges. Lui était entré le premier à Strasbourg le jour anniversaire de Bazeilles, et le jour anniversaire de Sedan nous avions pris Berlin.

Il ajouta quelques phrases pourtant bien simples, mais qui m’émurent presque autant : que le Printemps avait son exposition de duvetine, que l’omnibus Gare Saint-Lazare était devenu autobus, que le chasseur de Larue avait un crêpe au bras. Tous les habitués lui serraient la main.

Puis il me dit des phrases plus simples encore, mais avec l’air de me conter des anecdotes curieuses : que des gens s’aimaient, des gens se haïssaient, des gens se retrouvaient aux gares, que des gens se mariaient et vivaient ensemble.

Puis, des phrases qui me parurent plus étranges encore, sur les métiers : que les tuileries faisaient des tuiles, les épiciers des épices, les pâtissiers des pâtés…