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Circé.



J’y cours avec bonheur, car sur vos noirs rivages
Les rosiers idéals se mêlent aux cyprès,
Préparez sans remords les funestes breuvages,
Et donnez-moi vos mains que je les baise après.

De vos seins chauds et lourds s’élancent par bouffées
Des parfums pénétrants, âcres et singuliers,
Dans la vapeur de qui, follement attifées,
Dansent les visions de mes jours oubliés.

Je hume largement l’adorable démence
Qui m’enchante et me fait bienheureux pour longtemps ;
L’horizon s’élargit, vaste, écarlate, immense,
Et je marche au milieu de rêves éclatants :

Cauchemars d’opium, merveilles de féeries,
Oiseaux dont le plumage a l’éclat du soleil,
Chants d’amour ruisselant des lèvres attendries.
Lumières d’un été qui n’a pas son pareil !

Si je pouvais conter toutes ces épouvantes,
Tous ces ravissements énervants et succincts
Que j’éprouve en suivant les cadences savantes
Dont le rythme inflexible anime vos beaux seins !

Ce poème sanglant des voluptés perfides,
Où chante la sirène aux regards aiguisés,
Où passe, dans un vol, la ronde des sylphides,
Où bondissent les flots effrénés des baisers…