Page:Glatigny - Œuvres, Lemerre.djvu/238

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Ainsi, je me trompais, à l’aube de la vie,
Alors que dans mes bras d’enfant je te pressais,
Ô Lyre redoutable et grande, ô mon envie !
J’étais un impuissant, rien de plus. Je le sais.

Ah ! puisque l’horizon devant tes pas recule,
Puisque tu n’as plus rien au cœur et dans le front,
Roule donc au fossé, fou lâche et ridicule,
Cadavre dont les loups, demain, se gorgeront ! »

Mais, pendant que déjà le sombre suicide
L’enlace dans ses bras, il se redresse, fier,
Portant dans son esprit et dans son œil lucide
L’ardente volonté plus ferme que le fer.

Le sang abonde frais et puissant à ses tempes,
Son cœur ressuscité dans sa poitrine bat,
Et, pareil aux guerriers des anciennes estampes,
Il semble provoquer les Destins au combat.

C’est que, pendant qu’en proie à ses pensers funèbres
Il se laissait gagner par l’impure langueur,
Un envieux a ri dans les froides ténèbres
Et bavé sur les pieds de la Muse au grand cœur.

L’outrage a raffermi son âme chancelante,
Les découragements, dans un noir tourbillon,
Passent épouvantés, et l’insulte brûlante
L’a fait bondir ainsi qu’un divin aiguillon.