Page:Glatigny - Joyeusetés galantes et autres, 1884.djvu/58

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Elle venait, frappant le sol sec et sonore
D’un mouvement brutal avec ses lourds sabots,
Montrant sa peau hâlée, et pourtant blanche encore,
À travers ses habits composés de lambeaux.

Les branches encadraient sa beauté vigoureuse,
Et celle qui faisait alors ma passion,
Se pendit à mon bras, frissonnante et peureuse,
Comme un chat, à l’aspect terrible d’un lion.

Dis-moi donc, oh ! pourquoi ne t’ai-je pas connue
À l’heure où mes désirs bouillonnaient ? Oh ! pourquoi
N’avoir pas dirigé, fille à la jambe nue,
Tes regards cavaliers et pénétrants vers moi ?

Dans tes baisers brûlants j’aurais puisé la force,
Dans ton solide amour mon cœur se fût trempé,
Car le sang frais qui court sous ta vivace écorce
Est bien rouge et n’est pas d’eau saumâtre coupé.

Jamais je n’aurais su par quels secrets atroces
La race aux yeux câlins peut s’emparer de nous,
Mais, louve au sein gonflé de tendresses féroces,
Je me serais couché sans peur à tes genoux !