Page:Gobineau - Adelaïde - 1914.djvu/55

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Que voulez-vous ? Avez-vous la prétention de me faire passer mon existence entière dans la position odieuse que nous nous sommes créée, vous et moi ? L’amour que j’ai eu pour vous, vous accorde-t-il cette prérogative inouïe de me condamner au malheur et à l’isolement éternels ? C’est là ce que vous appelez de l’amour ?

— Je n’ai rien à expliquer, rien à justifier... Tiens, Adélaïde, j’ai eu tort, je t’aime, je n’aime que toi, je ne peux pas, je ne veux pas te perdre ! Impose-moi telle condition que tu voudras, j’y souscris, je te jure que je la tiendrai !...

— Tu ne tiendras rien ! je ne veux pas te tromper, je t’ai menti, je n’aime pas cet homme ! Je n’aime que toi, je n’aimerai que toi, tant que je respirerai, tant que je vivrai, il n’y aura que toi au monde pour moi ! Mais je te méprise, entends-tu bien, autant que je t’aime ! Tu me trahiras, tu m’abandonneras, tu me vendras à cette femme que tu exècres autant que moi et cela non pas pour un bien, non pas pour une vertu... tu n’en as pas ! mais pour la peur honteuse de quelques phrases dont tu ne crois pas le premier mot ! Il te faut pourtant le savoir et j’aurai la triste et poignante joie de te le dire une fois dans ma vie: tu m’as perdue et tu as fait de moi ce que j’ai bien l’intelligence de connaître que je suis, non pas pour m’avoir prise, puisque c’est moi qui t’ai pris, mais pour n’avoir pas su me garder et tu vas me reprendre et tu me. rejetteras encore et tu me reprendras toujours et tu me rejetteras sans cesse et tout cela pour