Page:Gobineau - Les Pléiades, 1874.djvu/134

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à fleur de tête, le front un peu gros, le nez un peu gros, les joues un peu grosses, mais tout cela d’un rose, d’un frais, d’un velouté délicieux ! Et de jolies moustaches blondes, et une jolie barbe blonde, et de jolis cheveux blonds, avec de si jolies boucles ! Sa taille moyenne, bien prise, annonçait devoir épaissir promptement, mais était encore à une rondeur très-agréable. Monseigneur le prince Maurice portait une jaquette de drap bleu, un gilet blanc, un pantalon gris, une cravate bleu de ciel, des bottines vernies à guêtres, un chapeau blanc ; à la cravate, une épingle d’or en fer à cheval ; au gilet, une double chaîne d’or tenant la montre avec quelques breloques d’un goût exquis, et, à la main, une paire de gants de fantaisie, comme il convient le matin.

Le prince Maurice s’avança jusqu’à la table devant laquelle Son Altesse Royale était retournée s’asseoir, de sorte que ce meuble était entre eux. Il avait l’air embarrassé, et, voyant que son auguste frère ne lui disait mot, il se décida à parler :

— Tu m’as fait demander ; eh bien ! me voici. Ça n’en est pas moins contrariant, parce que j’allais ce matin chez le photographe pour me faire prendre dans cet habit-là. Enfin, si tu n’en as pas pour longtemps…

— J’en ai pour longtemps ! répliqua rudement le prince en jetant la tête en arrière avec une expression de hauteur et de commandement. Je vous ai averti deux fois déjà de rompre des habitudes qui me déplaisent. Vous avez cru devoir persister ; vous ferez six semaines d’arrêts forcés.

— Tu trouves cela juste, toi, Lanze ? dit le jeune prince en se tournant vers le docteur.

Celui-ci attacha ses yeux sur le tapis et suivit les contours des fleurons avec le bout de sa canne.