Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/280

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rieux. Sur les morts on ramassa quelques cartouches. Nous avions environ trois cents fusils en état de partir et, tout compte fait, pour chaque fusil on eut trois charges. Rézy-Khan recommanda bien à chacun de ne pas tirer avant qu’il en donnât l’ordre. Mais on était si content que quelques-uns brûlèrent leurs charges le soir même pour célébrer la victoire : du reste, il importait peu ; nous avions de bonnes baïonnettes.

Par un hasard très-favorable, on découvrit aux environs une sorte de camp retranché, construction des anciens payens, avec quatre remparts de pierre et au milieu une sorte de mare. Nous allâmes nous renfermer là pour y passer la nuit ; nous fîmes bien : car, à l’aube, les Turkomans revinrent, et comme ils étaient plus nombreux que nous, s’ils nous avaient attaqués de nouveau en rase campagne, nous aurions pu avoir assez de peine.

Derrière nos murs, nous fîmes feu sur les ennemis et nous en tuâmes quelques-uns. Enragés, ils mirent pied à terre et montèrent comme des fourmis sur nos pierres accumulées ; alors nous tombâmes dessus à la baïonnette, et Rézy-Khan à notre tête ; nous les maltraitâmes tellement que, après dix minutes d’efforts, ils lâchèrent pied et s’enfuirent. Malheureusement Rézy-Khan et le grand Bakhtyary qui combattaient comme des tigres furent tués l’un et l’autre. Moi, je reçus au bras un coup de couteau ; mais, Dieu est grand ! ce fut une égratignure.