Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/44

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de la spéculation est que notre compagnie se trouve désormais en état de fournir des épouses et des intendants de mérite à tous les Turcs élevés en Europe et qui tiennent à se faire un intérieur convenable, ou encore aux personnes appartenant à des communions différentes et qui savent apprécier la beauté et le talent.

— Cet Arménien est assurément un homme de génie ! murmura Paul Petrowitch, levant les yeux au ciel et croisant les mains sur son ventre.

— C’est presque ce qu’a dit notre associé américain à Constantinople, quand nous avons partagé nos bénéfices de l’année dernière. Mais il est hors de doute que la voie dans laquelle nous marchons aujourd’hui, et l’extension illimitée de nos affaires, va nous faire monter au-dessus de nos espérances.

— Je le pense ainsi, mon bon, mon parfait ami, et qui plus est (car je ne songe pas qu’à ma seule propriété ! je m’occupe aussi du bonheur de mes semblables ! je suis avant tout un philanthrope, moi !), regarde quel bien nous faisons !

— La chose est claire, repartit Grégoire Ivanitch avec une grimace de supériorité. Nous achetons, pour une centaine de roubles pièce, des pauvres diables de marmots condamnés à végéter ici dans la fange, dans la faim ; nous les rendons gentils, doux, aimables, sociables, cela devient des grandes dames et des messieurs, à tout le moins de bons bourgeois ou de braves domestiques. Je voudrais bien savoir qui peut se vanter