Page:Gobineau - Nouvelles asiatiques 1876.djvu/50

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poser au respectable Paul Petrowitch une très-belle occasion de faire le bonheur d’Omm-Djéhâne.

— Si vous faites son bonheur, répondit les Splendeurs de la Beauté, elle en sera peut-être reconnaissante, mais, encore faudrait-il savoir comment vous l’entendez.

Grégoire Ivanitch agita la main droite en l’air et secoua la tête d’un air de désintéressement et de magnanimité.

— Bah ! dit-il, je le sais ! Si j’étais pour quelque chose dans l’affaire, elle ne se montrerait pas plus touchée aujourd’hui qu’elle ne l’a été il y a trois mois ; elle ne veut pas entendre parler de son serviteur, c’est convenu, et son serviteur n’est pas du tout disposé à se laisser venir du mal à l’estomac pour qu’on le dédaigne. Ces sottises-là sont du ressort des serviteurs de l’Esprit. Non ! Laissez-moi de côté. Je viens bonnement proposer à Omm-Djéhâne de la marier à un Kaïmakam. Pour tout vous dire, j’avais emporté l’autre jour sa photographie, telle qu’il y a huit ans la femme du général l’avait fait faire. Je l’ai montrée au digne homme dont je vous parle, et, vraiment, il a pris feu. C’est un digne homme, je le répète. Il n’a que soixante-dix-ans ; on le trouve Musulman sévère ; il ne boit ni vin ni eau-de-vie, cela plaira à Omm-Djéhâne qui déteste si fort ce qui est bon ; il a une horreur encore plus prononcée pour les Européens, ce qui lui conviendra également, à elle, dont le sentiment n’est pas