Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/100

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d’un air très méditatif, puis il dit à don César :

— Mon ami, je dois vous dire que je ne suis pas aussi persuadé que Mme de Bianconero de votre filiation ; néanmoins je vous crois un caractère honorable et, comme la fantaisie de retrouver ce malheureux enfant a fait le malheur de sa vie, que, sans trop d’efforts, il vous est facile de la rendre heureuse, loin de m’opposer à ce que vous soyez reconnu comme son enfant et le mien, je vous en supplierais même, s’il en était besoin.

"Mais, entendez-moi bien et retenez mes paroles. Le bonheur de Mme de Bianconero est ma première étude. Si vous vous conduisez bien avec elle, si vous ne lui causez pas l’ombre d’un chagrin, ma reconnaissance sera sans bornes, et mon attachement facilitera tous les chemins à votre ambition. Si, au contraire, vous trompiez mes espérances, vous auriez en moi le plus impitoyable ennemi.

Oui, don César, je ne vous pardonnerais jamais et j’essayerais même de trouver au fond de mon cœur assez d’énergie - et cet effort me coûterait la vie en m’ôtant le repos - assez d’énergie, dis-je, pour vous faire tout le mal qui serait en mon pouvoir."

Don César, touché d’un pareil attachement et de l’expression passionnée du vieux marquis, allait protester, et du fond de son cœur, de la droiture de ses intentions, quand la marquise parut, rajeunie par un air de joie qu’on ne lui avait pas vu depuis bien longtemps. M. de Bianconero salua