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Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/103

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tout ce qui lui rappelait sa première fortune.

Au bout d’un mois, cette longue vertu finit par ennuyer ; et c’est bien simple : dans le monde on aime à voir changer souvent la décoration. On se demanda donc : "Ah çà ! que fait le jeune Bianconero avec ces histrions ? Est-ce qu’il n’aurait jamais d’intimités plus relevées ? On ne trouve qu’eux dans le salon de sa mère."

Au bout de six mois on se plaignait universellement de ne pouvoir plus aller dans cette maison-là. Au bout de huit mois, la marquise elle-même était parfaitement lasse de tous ces braves gens, qui n’avaient en aucune manière ni le ton ni les habitudes de la bonne compagnie ; enfin elle finit par leur faire défendre sa porte, catastrophe que le marquis avait prévue depuis longtemps et dont il avait voulu leur éviter les déboires. Il continua, quant à lui, à les recevoir le matin comme par le passé, et à leur rendre tous les services qui étaient en son pouvoir.

Enfin, au bout de dix mois, don César reçut de Colombine le billet suivant :

Mon bon Scaramouche, car je ne puis me déshabituer de te donner ce nom sous lequel je t’ai connu si beau, si spirituel, si aimé, je n’ai plus le courage de te voir et je t’écris pour t’annoncer que, par mon ordre, notre porte te sera dorénavant fermée. Chacun doit faire son métier. Le tien n’est plus de mener joyeuse vie derrière la toile, bras dessus bras dessous avec la misère, et