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Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/109

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alla saluer à Florence le grand-duc, qui reçut le grand seigneur tout aussi bien que jadis le comédien, puis il vint enfin s’abattre à Venise pour y fixer, du moins momentanément, son séjour.

Six ans au moins, s’étaient écoulés depuis qu’il avait quitté cette ville, et il ne revit pas sans émoi ces quais, ces palais, ces arcades, ces places, témoins de ses premières amours. Quant à la défense qui lui avait été faite d’y jamais rentrer, on pense bien qu’il ne s’en inquiéta guère. Ce n’était pas au comte de Bianconero à se souvenir des humiliations de Scaramouche.

Mais si cet illustre personnage oublia, ou à peu près, toutes les douleurs de l’ex-bohémien, il n’en fut pas de même de ses joies ; car, à peine arrivé, don César se mit en quête de tous les plaisirs que présentait cette capitale, célèbre à jamais, comme on sait, par la facilité des mœurs de ses habitants et surtout de ses belles habitantes. Le Jeu ; la comédie, le bal, les mascarades remplissaient les journées de l’heureux comte Biancoriero ; il se trouva bientôt lié avec ce que la ville comptait de plus brillants cavaliers et surtout de plus nobles ; car, il faut l’avouer, don César, parmi toutes les brillantes qualités qui le distinguaient, avait depuis son élévation laissé germer, pousser et grandit une certaine morgue qui ne lui permettait pas de se lier avec des gens de naissance peu remarquée. Lorsque quelque étranger le trouvait en compagnie d’un jeune homme ou d’un vieillard