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sous le soleil et qui me paraît contenir une joyeuse société.

— Ohé ! l’ami ! s’écria d’une voix forte un personnage décoré de magnifiques favoris noirs et lustrés, et qu’au fouet qu’il tenait en main on reconnaissait pour le conducteur, sommes-nous encore loin d’un village ?

— Je ne sais pas, mon bon seigneur, répondit Matteo, je ne suis pas du pays.

— J’ai terriblement soif, grommela l’automédon.

— Et moi furieusement, répétèrent deux personnages assez fantastiquement accoutrés qui se tenaient près de lui.

Aussitôt quatre ou cinq voix d’hommes, de femmes et d’enfants sortirent du creux de la machine et s’écrièrent :

— J’ai soif, moi ! J’ai faim ! J’ai chaud !

Bref ce fut un concert qui proclamait tous les besoins tourmentant la frêle humanité.

Matteo, en homme qui s’ennuie d’aller à pied, offrit la gourde qui pendait à son bâton, elle fut acceptée avec reconnaissance, vidée avec soin et rendue au prêteur par le gros cocher qui l’accompagna de ces paroles gracieuses :

— Es-tu fatigué, toi ?

— Certes, oui.

— Monte dans la patache.

Matteo accepta avec une reconnaissance tellement empressée qu’il écrasa le pied d’un enfant et tomba sur les genoux d’une des femmes. En se relevant, il s’aperçut qu’elle était jolie et salua.