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après quelques efforts pour nouer la conversation. Au moment de se séparer, la religieuse embrassa Angélique et lui dit :

— Soyez heureuse, mon, enfant, autant que je le veux et plus que je ne le crois.

Angélique se mit à pleurer comme il est d’usage en pareille occurrence, et le comte saisit cette occasion pour dire au chevalier, en le prenant par le bras :

— Pardieu ! je suis bien aise qu’elle ait prononcé cet aphorisme, car je la croyais muette ; c’est un poisson, mon cher ami, avec qui tu me laisses en tête-à-tête.

— Je te réponds, sur mon âme, de sa beauté et des grâces de sa conversation, s’écria le chevalier en serrant son ami dans ses bras ; mais elle n’est bien que sans témoin. Adieu et reçois ma bénédiction avec mes remerciements.

Cela dit, il fit monter Angélique dans une chaise de poste qui se trouvait là à les attendre et qui les porta… ma foi, je ne sais pas où et je n’ai pas le temps de le chercher.

— Belle dame, dit alors don César, je sais que vous avez un vif désir de voir Trieste… C’est une belle ville… et certainement…

— Monsieur, interrompit la religieuse, allons d’abord à Ancône où je compte m’embarquer ; je crois que nous pourrons nous quitter là.

Don César ne l’écoutait plus ou plutôt ne la comprenait plus ; tous ses sens étaient confondus dans son oreille, pour bien saisir, pour mieux