Page:Gobineau - Scaramouche - 1922. djvu.djvu/55

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répondit Tartaglia en gémissant. Vous en serez quittes pour courir les grandes routes et pour mourir de faim ; vous ne risquez pas la prison comme moi.

— Nous ne risquons pas la prison ! dit Polichinelle d’un air indigné. Et qui donc, si ce n’est moi, doit mille ducats à ce damné parfumeur qui demeure en face ? Le pâtissier d’Arlequin n’a-t-il pas obtenu une prise de corps contre lui ? Colombine n’est-elle pas brouillée avec sa modiste, Barbara avec la crémière, Pantalon avec le carrossier, et jusqu’à ce pendard d’Amour avec le plumassier ?

— Holà, holà ! continua Tartaglia en pleurant plus fort, vous n’avez pas vu que ce damné domestique vient de me remettre une missive ; sa maîtresse s’imagine que c’est ma pauvre langue qui a raconté au prince son intrigue manquée avec Matteo, et elle m’informe qu’avant une heure je serai au cachot, pour ce qu’elle appelle mes crimes.

Il avait à peine terminé, qu’un coup violent ébranlait la porte de la rue. Colombine courut à une petite fenêtre et revint en riant aux éclats.

— Sauve qui peut ! dit-elle ; le plumassier, le pâtissier, le parfumeur, le carrossier, la modiste et la crémière, le tout soutenu d’un piquet de fantassins, à l’adresse de Tartaglia, assiègent la maison ! Envolons-nous, mes oiseaux !

Tout le monde fut debout, Polichinelle laissa son chapeau d’homme du monde et sauta sur son costume de théâtre ; il n’en trouva qu’une partie,