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mais ce fut autant d’emporté. Arlequin brandit sa latte, chercha sa bourse et la trouva vide. Il l’emporta de même. Barbara embrassa une casserole d’argent, l’Amour prit ses jambes à son cou, et tout le monde, y compris Matteo, s’enfuit vers le jardin et en arpenta les allées. Par bonheur, la petite porte était ouverte. Les fugitifs se jetèrent dans la rue, chacun se sauva de son côté et, pour se rejoindre, Matteo cria ce mot d’ordre :

— A Santa-Honorata !

En effet, le soir, assez tard, chacun se trouva au rendez-vous. Un seul manquait : c’était Tartaglia qui, trop gros pour courir et moins ingambe que Polichinelle, avait cru faire merveille en se mettant derrière un arbre et s’y était fait prendre. Il ignorait, hélas ! que cette ruse, découverte primitivement par l’autruche, n’a jamais sauvé son inventeur. Ainsi donc, au moment de la réunion générale, le pauvre garçon se trouvait prisonnier sous n’importe quel prétexte ; mais, dans le fait, victime innocente et infortunée de la vindicative comtesse Bernardina.

Lorsqu’on eut assez déploré l’absence du malheureux Tartaglia, on s’achemina, pour tenir conseil, vers un cabaret champêtre qui étalait sur le bord de la route ses tonnelles de vigne vierge quelque peu poudreuse. Matteo fit venir l’hôtelier et, après un examen assez triste des finances de la troupe, fit apporter un broc de gros vin de la Romagne et quelques menues victuailles.

La situation, embarrassée quelques heures auparavant,